Les notes suivantes, principalement prises pendant une séance du congrès WLIC 2022, ont dû être coupées du rapport qui sera publié dans le prochain numéro de Hors-Texte, le bulletin des bibliothécaires genevois. Plutôt que de mettre ce passage à la poubelle, j’ai préféré en faire un billet de blog.
Année 2022 mouvementée pour l’IFLA, qui a vu le secrétaire général Gerald Leitner relevé de ses fonctions après des plaintes de maltraitance au travail et des rumeurs de dépenses inappropriées. Des démissions au sein du governing board de l’IFLA ont suivi (y compris la présidente-élue et le trésorier, mais officiellement sans rapport avec la première décision), et certains membres (particulièrement dans les pays du nord) relevaient un gros manque de transparence de la part de l’association.
« Out in the open »
Une session était donc organisée pour clarifier la situation, d’autant que l’assemblée générale n’avait pas lieu pendant la conférence elle-même. Malheureusement, les réponses évasives ont surtout apporté de nouvelles questions. D’étranges manifestations de double-pensée orwellienne ont fait réagir la salle à plusieurs reprises.
La présidente Barbara Lison laissait ainsi entendre que d’une part le secrétaire général Leitner avait été relevé de ses fonctions sans délai en raison d’une perte de confiance suite aux plaintes répétées du personnel administratif sous sa charge, mais qu’aucun fait ne pouvait lui être reproché pour autant. Puis le nouveau trésorier qu’aucun abus d’ordre économique n’avait été commis et qu’une enquête approfondie était absolument inutile et trop coûteuse, mais que l’IFLA avait quand même changé d’expert-comptable tant le travail du précédent était désastreux. Dommage : une enquête approfondie aurait pu mettre fin aux rumeurs ou au moins clarifier la situation.
Mais le plus gros morceau était l’explication pour les nouveaux et nouvelles venu·e·s de la structure financière de l’IFLA : pour des raisons fiscales, l’argent dont dépend l’association, issu d’une donation massive de la fondation Gates, est en réalité contrôlé par une fondation néerlandaise (Stichting IFLA Global Libraries ou SIGL). Le personnel du siège de l’IFLA reste salarié par cette organisation pour des raisons fiscales et elle couvre plus de la moitié du budget annuel de l’association. Or le secrétaire général de SIGL n’est autre que l’ancien secrétaire général de l’IFLA, Gerald Leitner. De nombreux rires jaunes se sont élevés dans la salle quand la présidente a affirmé qu’aucun conflit d’intérêts n’en résultait et que son inadéquation à diriger l’IFLA n’affectait pas sa gestion de SIGL.
Secousses secondaires
Les mois suivants n’ont pas été plus rassurants. D’autres commentaires sur la crise ont également été faits lors de (et après) l’assemblée générale du mois d’août. Un numéro spécial incendiaire de Biblioteksbladet, le journal suédois des bibliothèques, a même eu pour l’occasion une édition en anglais intitulée “Fear and loathing in the Hague”, dont la lecture est recommandée (Actualitté en a fait une reprise en français).
Enfin, si on ne se rallie pas à l’interprétation à charge de Biblioteksbladet, la situation de dépendance financière de notre faîtière explique peut-être pourquoi le SG Leitner semble avoir été protégé de toute critique après son renvoi par l’IFLA, au point qu’un accord a été signé avec lui, l’exonérant de toute faute quelques mois plus tard.
J’ai préféré ne pas inclure dans ce billet un lien vers une source de rumeurs qui agit en ligne sous pseudonyme et dont je ne peux pas confirmer la fiabilité – celle-ci pourrait relever de la diffamation et je ne suis pas adepte de la chasse aux sorcières. Si vous la cherchez, je vous invite également à accueillir ses affirmations avec un regard critique.
En bref, je n’ai aucune idée de la réalité des faits et fautes des uns et des autres. Reste que le manque de transparence a fait mal à l’image de l’IFLA, et qu’il paraît légitime d’avoir des craintes pour ses futures activités tant que la relation avec SIGL n’est pas stabilisée… ce qui passe à mes yeux nécessairement par un départ du SG de celle-ci. À suivre ?